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L’actualité juridique congolaise reste dominée par des controverses autour de contreseing du Vice-Premier Ministre et Ministre de l’Intérieur sur les Ordonnances du 17 juillet dernier du Président de la République, portant notamment sur les nominations et affections de quelques Magistrats et Commandants des Forces-Armées de la République Démocratique du Congo. D’aucuns pensent qu’il était tout à fait normal pour le Vice-Premier Ministre de contresigner en lieu et place du Premier Ministre, car il assumait ainsi l’intérim de ce dernier en mission du 16 au 19 juillet dans le Haut-Katanga. D’autres par contre disent que le Vice-Premier Ministre ne devrait pas outrepasser l’acte qui l’avait désigné intérimaire. Que dit alors la Loi ou mieux le droit à ce sujet ?

En effet, dans son Ouvrage « Traité de Droit Administratif », le Professeur Félix VUNDUAWE te PEMAKO, actuel Premier Président du Conseil d’Etat et qui fut également notre Directeur de Mémoire de Licence à la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa, définit l’intérim comme « la situation dans laquelle une autorité administrative agit en lieu et place d’une autre autorité administrative qui lui est supérieure en vertu d’une décision d’intérim ayant pour fondement soit un texte légal ou réglementaire, soit le principe de la continuité et de la régularité des services publics » (Voir la page 681). Et le Professeur souligne dans cet Ouvrage que les pouvoirs de l’intérimaire sont en principe déterminés dans l’acte qui organise l’intérim.

De ce fait, l’acte d’intérim se doit de se fonder sur un texte juridique (légal ou réglementaire). Et dans le cas d’intérim du Premier Ministre, c’est l’article 90 de la Constitution qui prévoit cela, en disposant que le Gouvernement « est dirigé par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement. En cas d’empêchement, son intérim est assuré par le membre du Gouvernement qui a la préséance ».  Cet intérim, prévu par un texte juridique (Constitution), n’est pas automatique ; il faut alors un acte d’intérim (décision d’intérim) désignant le membre du Gouvernement qui a la préséance à assumer l’intérim. Ainsi, dans le cas d’espèce, c’est le Vice-Premier Ministre et Ministre de l’Intérieur qui était le membre du Gouvernement, se trouvant à Kinshasa, qui avait la préséance.

Pour ce faire, le Premier Ministre, sachant que son empêchement n’est pas définitif, a pris soin de circonscrire les pouvoirs de l’intérimaire dans l’acte d’intérim, en précisant ceci : « à veiller à ce que tout courrier destiné au Premier Ministre soit réceptionné à son Cabinet avant toute réorientation ». Autrement dit, il (1er Ministre) gardait tous ses autres pouvoirs, notamment le pouvoir de contresigner du fait qu’il était juste en déplacement à Lubumbashi (qui n’est qu’une partie du territoire national). Et avec l’évolution de l’informatique, il pouvait continuer à poser certains autres actes liés à ses fonctions de Premier Ministre à partir de ce coin de la République, notamment contresigner les Ordonnances du Président de la République.

De ce qui précède, nous pensons que le contreseing du Vice-Premier Ministre et Ministre de l’Intérieur semble être irrégulier et s’apparente à la fraude. Ce qui expose son auteur aux sanctions disciplinaires. Du moins,  l'annulation pour excès de pouvoir desdites Ordonnances devant le juge administratif (Conseil d'État) s'avère difficile, car le grief dans le chef du Premier Ministre semble inexistant.

Merci !

Maître Victor EBENYA MOLONGI

Tag(s) : #contreseing,, #Vice-Premier Ministre et Ministre de l'Intérieur, #Réforme de la justice, #Conseil Supérieur de la Magistrature, #Ilukamba, #Conseil d'État, #Victor EBENYA MOLONGI
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